J'entre chez mon arrière-arrière grand-père en 1875

  
      Nous sommes le 2 août 1875. Profitons de cette journée d'été pour parcourir l'avenue de Saint-Mandé dans le 12e arrondissement.


L'avenue de Saint-Mandé à la fin des années 1870



      Il est une heure de l'après-midi. Maître Lavocat, notaire, entre au n° 113, près du carrefour avec le boulevard des Maréchaux. Il est venu pour établir l'inventaire des biens du locataire des lieux, Alexandre Pierre Levert, ancien employé de la caisse des dépôts, décédé d'une maladie le 1er juillet précédent. C'est l'oncle du défunt, Charles Tirel, qui lui ouvre. Il se trouve en compagnie de la veuve, Louise Rousseau et de l'unique enfant d'Alexandre, Blanche Levert, âgée de 12 ans.

Blanche Levert au début des années 1900


L'inventaire nous apprend que la maison comporte une cave, deux niveaux d'habitation et un grenier. Au rez-de-chaussée, le salon et la salle à manger donnent sur le jardin et la cuisine sur une allée. L'étage comporte deux chambres et un petit cabinet de travail.


          Le notaire commence par lister le contenu de la cave qui ne contient que des bouteilles vides et du bois pour le chauffage.


          Dans les autres pièces on trouve beaucoup de banalités comme les ustensiles de cuisine en cuivre, le linge de lit, les rideaux, mais certains objets témoignant du confort de vie de la famille. 

          Alexandre Levert appartenait à la classe moyenne et il avait pu poursuivre un niveau d'études assez élevé puisqu'en 1846 il avait obtenu son baccalauréat ès-lettres. D'ailleurs, dans son salon, Alexandre possédait une bibliothèque en acajou remplie de plus de 150 volumes reliés et brochés, preuve de son amour pour la littérature. L'un des murs du salon était orné d'un grand miroir avec un cadre doré. Alexandre Levert payait aussi des leçons de musique à sa fille Blanche qui avait à sa disposition un piano droit en palissandre dans la salle à manger.

            Dans la chambre du couple les meubles sont en noyer comme le lit et la commode ou en acajou comme le petit secrétaire avec son dessus de marbre. Dans le cabinet adjacent, on trouve une armoire elle aussi en noyer. La chambre de Blanche est moins garnie avec seulement un lit en fer et un chiffonnier.

            Le plus intéressant reste l'inventaire de la garde-robe et des bijoux de la famille. Chacun des deux époux possédait pour 200 francs de vêtements. Tous les deux avaient à leur disposition 24 chemises, 12 mouchoirs et une montre en or chacun. Louise Rousseau avait presque une robe pour chaque jour de la semaine puisqu'elle en possédait 6. Elle n'avait par contre pas beaucoup d'autres bijoux que sa montre, à peine une bague (sans doute celle du mariage), une paire de boucles d'oreilles en or et un bracelet en argent. On apprend qu'Alexandre Levert avait une mauvaise vue puisqu'on retrouve deux lorgnons. Il avait donc aussi les moyens de prendre soin de sa santé.

          Le linge de maison est lui aussi assez impressionnant puisqu'il se compose de 20 draps, 22 taies d'oreiller, 42 serviettes dont 12 de toilette, 40 torchons et 6 tabliers de cuisine.

            L'inventaire après-décès recense aussi les divers papiers du défunt. On sait qu'une partie de l'argent d'Alexandre Levert provenait de la vente d'une maison que sa mère avait vendue en 1869. Il était de plus enfant unique et était donc le seul héritier de son père (sa mère ne décèdera que deux ans plus tard). Au moment de son décès, il possède 803 francs en liquide. Une grande partie sera utilisée pour régler les frais funéraires au cimetière de Montmartre et payer un trimestre de loyer (700 francs annuels).

    Deux ans plus tard, la mère d'Alexandre Levert, Marianne Tirel, décède à son tour à Paris. Un inventaire de sa maison sera également dressé. On retrouve de nombreuses similitudes entre les biens de la mère et du fils ce qui nous prouve que ces inventaires sont le reflet du niveau et du mode de vie d'une catégorie sociale.
    


 


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